Script-quizz n°05

 

Salut à toutes, tous.

La littérature qu’on se délecte à lire est aussi la matière première de tous les films, téléfilms et séries que nous aimons à mater. Même s’il ne s’agit pas de l’adaptation d’un bouquin mais d’une oeuvre originale, derrière chaque thème, chaque séquence, dans certains cas chaque plan, le travail de base est celui d’un écrivain. Eh ouais, un gadjo tout seul avec ses clopes et sa boutanche devant sa ch’tite machine…

Trouvez ci-dessous un bout de scénario. A vous de deviner de quel film il est extrait…

 

EXT Jour, désert

Plan large sur une plaine désertique. De hautes dunes au loin. Un camion s’approche. On reconnaît le Berliet de Plouc et Steiner.

 

EXT Jour, camion

Par le pare-brise. Steiner est au volant. Plouc dort, le chapeau sur les yeux.

 

EXT Jour, désert

Le camion roule et s’enfonce dans une mare de sable mou.

 

EXT Jour, fech-fech

Plan sur les roues enfoncées dans le sable. Après une tentative d’accélération, elles s’arrêtent.

 

EXT Jour, autour du camion

Plouc descend et fait le tour de la cabine pour venir côté passager. Steiner ouvre la portière, debout sur le marche pied.

Plouc :
Oh le con !

Steiner :
Et alors ?… On s’est plantés dans le fech-fech, c’est tout…

Plouc :
« On » ? J’aime ça : « on » ! Une tache comme le Tanganyika et tu l’as pas vue ? (il se frappe les tempes) Qu’est-ce que t’as là d’dans ? De l’Isorel, hein ?

A l’arrière, le passager en djellaba passe la tête hors de la bâche.

Steiner :
Tu me fais passer une radio ou on prend les pelles ?

Plouc (au passager) :
Et toi, qu’est-ce que t’attends, hein ?

Le passager disparaît derrière la bâche, revient avec les pelles.

Le passager :
Voilà les pelles.

 

INT Jour, cabine camion.

Un autre camion s’approche de celui de Plouc et Steiner. Plan sur l’épaule du chauffeur, de dos.

 

EXT Jour, désert

Près du Berliet ensablé, Steiner, Plouc et le passager regardent s’approcher le nouvel arrivant, qui s’avère être un semi Berliet, avec quatre citernes en remorque.

Le camion citerne s’arrête. On reconnaît Mitch qui descend de sa cabine et s’approche, accompagné de Saïd, son mécano, lequel s’est saisi d’une paire de pelles.

Mitch :
Mais ma parole, c’est le champion de la ligne ! Le cador du volant ! Pardon, messieurs, excusez ma curiosité, mais vous seriez-t’y pas ensablés, des fois ?

Plouc (en train de pelleter) :
Tu veux savoir ? Eh ben t’es même pas drôle.

Mitch (à son mécano) :
Allez, mon gars, en avant les pelles et les tôles. Faut savoir aider son prochain. Qu’est-ce que tu veux, c’est les misères de l’âge, hein ! Faut faire semblant de s’apercevoir de rien. Pauvre Plouc, il a la vue qui baisse, alors il roule de plus en plus à côté de la piste. On le récupère un peu partout. Des fois au Mozambique, des fois sur la Nationale 7, des fois, comme c’est le cas, dans le fech-fech ! Alors on le ramène en remorque pour pas qu’il perde sa place. Ben, un vieux, faut bien qu’ça mange…

Plouc :
T’as fini, oui ?

Mitch :
Oui, oui… Allons-y. Alors je propose vingt pelletées à la minute. C’est une bonne cadence, d’accord ?

Steiner :
On peut faire mieux.

Mitch :
Bon alors vingt-cinq, mais à condition que l’aïeul s’arrête dès que son cœur lâche !… Allez !…

Tout le monde pelle. Le passager, voyant que personne ne le regarde, essaie de tirer au flanc, mais un regard appuyé de Steiner le remet au travail.

Mitch (se redressant) :
Dites donc, qu’est-ce qu’il vous avait fait, le Sourdingue, pour que vous le mettiez dans cet état-là ? Il avait pas l’air content… Il m’a dit aussi que cette petite vache de Rocco se trimballait avec une fille. C’est vrai ?… Peut-être qu’il l’aura ramassée en bordure de piste…

Plouc (exaspéré) :
J’en sais rien !

Mitch :
Tiens, ça me rappelle ma Finlandaise. Tu la connais mon histoire avec la Finlandaise ?

Plouc lève les yeux au ciel.

Mitch :
Ouais… (à Steiner) Ben toi qui la connaît pas, tu vas te poiler…

Il va se placer à côté de Steiner, à l’avant du camion.

Figure-toi qu’un jour, sur la piste d’In-Saoud, je tombe sur un p’tit ingénieur des pétroles avec sa Land-Rover en rideau. Il avait sa bonne femme avec lui, une grande blonde avec des yeux qu’avaient l’air de rêver et un sourire d’enfant… Une salope, quoi. Moi je repère ça tout de suite parce que les femmes c’est mon truc.

Plouc :
Ah c’est pas comme le pelletage, hein ?

Mitch (l’ignorant) :
Alors aussi sec je propose au p’tit ingénieur : « Si vous voulez, j’emmène votre dame à Agdid, pis j’vous envoie la dépanneuse ». Le branque dit oui et me v’là barré avec la poupée… (il se retourne) C’est pas vrai, Saïd.

Le mécano accourt de l’arrière du camion.

Saïd :
Tout ça c’est vrai !

Plouc :
Ouiiii c’est vrai. Et c’est même vach’ment intéressant !… Tu vas bosser un peu, dis, hein ?

Mitch :
Une seconde, ça l’intéresse. (à Steiner) Hein que ça t’intéresse ?

Steiner :
Oui oui…

Mitch :
Alors sitôt partis, j’me mets à conduire d’une main. Et v’là qu’la môme se met à faire des minauderies. Tu sais, façon pudeur. Des p’tites manières de bonne femme, quoi, sous prétexte que Saïd était en train de prendre un jeton. Et à ce moment-là, on arrive dans la zone des dunes. Alors je dis à ma Finlandaise : « Est-ce que vous avez déjà vu la rose des sables ? ». « Non » qu’elle m’fait. Alors j’arrête le bahut et j’dis : « Voyez la dune là-bas ? Eh ben derrière, y’a les plus belles roses des sables de tout le Niger ! ». Eh ben elle a voulu y aller voir…

 

CUT

 

EXT Jour, camion

On est maintenant sur le camion de Rocco, qui roule sur la piste. Par le pare-brise, on voit Rocco, au volant, qui est en train de raconter à Peppa, sur le siège passager, la même histoire que Mitch.

Rocco :
Une heure plus tard, Mitch et sa souris sont à Ibn Doulfri, en train de se remonter à coups de perniflard. Tout à coup, le cocu débarque, va droit sur sa femme sans dire un mot, et il lui balance une paire de mandales à tuer un buffle !

Peppa :
Quelqu’un l’avait prévenu ?

Rocco :
Le sable… Mitch, qui parle toujours trop, avait dit : « Une fois dépanné, vous suivez mes traces jusqu’à Ibn Doulfri ». Le p’tit ingénieur avait suivi les traces jusqu’au bout, jusqu’aux dunes. Là, c’étaient plus des traces de pas qu’il y avait. C’était aussi clair que si on lui avait fait voir un plumard, au mec !

Peppa :
Ça s’est terminé comment ?

Rocco :
Après les tartes à la bergère, le gars aurait bien continué à jouer les hommes, mais Mitch a bloqué la première pêche et il lui a dit : « Tu viens de briller, gâche pas tes cartes ! ».

Peppa :
Et son mari n’a rien dit ?

Rocco :
Tu sais : quand les types de 130 kilos disent certaines choses, ceux de 60 kilos les écoutent…

 

(A suivre)

 

8 commentaires

  • LECHAUVE Dominique dit :

    Belmondo et Ventura, encore des dialogues d’Audiard dans un film de Verneuil. Trop superbe le cinéma des années 60 . Un chef d’œuvre tout simplement

  • Véronique dit :

    Des camions , des chauffeurs….vite fait j’ai pensé au Salaire de la peur mais ce n’était pas Mario et Johnny , et pas de nitroglycérine…..Alors c’est beaucoup d’argent under the sun..??
    J’aime la dernière réplique !..

    • LECHAUVE Dominique dit :

      Véronique, c’est une réplique, mas je ne suis pas toujours d’accort avec les répliques . En effet j’ai joué au rugby plus de 20 ans et à cette époque je ne pesais que 65 kg, et je n’écoutais pas les gros d’en face, je les faisais courir…du coup ils ne disaient plus grand chose (mdr)

  • Oliv' dit :

    En vacances à Marrakech il y a quelques années j’ai eu la grande surprise de visiter – complètement par hasard ( et pas rasé..) – la cour dallée avec la fontaine centrale où se déroule la bagarre finale entre Rocco – Bebel et Plouc – Lino…
    Une grande émotion d’admirer ce patio avec l’oeil du spectateur du film de Verneuil, ce  » western des sables » comme il aimait dire.
    Depuis je l’ai revu plusieurs fois, autant dire que j’ai dù mettre une nano-seconde à deviner le quizz !
    Y avait aussi La Betterave … 100.000 merci Thierry !

  • Brice dit :

    J ai lu ça avec du Nuclear Rabbit dans les oreilles, Jean Gaudin is a bass killa !!
    Excellent film et dialogues !!

  • Maître Folasse dit :

    De mémoire Fernand Naudin c’est dans les Tontons non ?

  • Raoul Volfoni dit :

    Je confirme !

    – Fernand : Dites donc, il picole pas un peu votre british ?
    – Maitre Folace : Oh, lala !… Et il est pas plus british que vous et moi. C’est une découverte du Mexicain.
    – Fernand : Il l’a trouvé où ?
    – Maitre Folace : Ici… Il l’a même trouvé devant son coffre-fort pour armes, il y a 17 ans de ça. Avant d’échouer devant l’argenterie, l’ami Jean avait fracturé la commode Louis XV. Le Mexicain lui est tombé dessus juste au moment où l’artiste allait attaquer les blindages au chalumeau.
    – Fernand : Je vois d’ici la petite scène.
    – Maitre Folace : Vu ses principes, le patron ne pouvait pas le donner à la police… Ni accepter lui-même de régler les dégâts. Résultat : Jean est resté ici 3 mois au pair comme larbin pour régler la petite note. Et puis la vocation lui est venue… Le style aussi… Peut-être, également, la sagesse. Dans le fond : nourri, logé, blanchi, 2 costumes par an… Pour un type qui passait la moitié de sa vie en prison !…
    – Fernand : …Il a choisi la liberté quoi !

  • Boooon…
    Alors comme ça, on est des cadors, question cinéma français ? On est des as de la pelloche ? Des champions de la salle obscure ? Les caïds du grand écran ?…
    Vous avez sans peine reconnu Cent Mille Dollars Au Soleil, tourné par Henri Verneuil (assisté du jeune Claude Pinoteau) dans le sud marocain, à une époque (1964) où la région restait mystérieuse et exotique aux yeux du Français moyen, bien avant qu’on y exporte des retraités en camping car.
    La scène dite « de la Finlandaise » est un tel classique qu’on la trouve sur You Tube.
    A noter que c’est Bernard Blier qui joue Mitch, le dit Monseigneur Blier étant loin de peser cent trente kilos… Mystères du bon vieux cinoche !

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